Marcé-sur-Esves
Le nom de cette commune, située au sud-est de Sainte-Maure-de-Touraine, apparaît pour la première fois en 1080, dans la charte 75 du Cartulaire de Noyers, sous la forme Marthiacus, venant de Marciacus ou « domaine agricole de Marcius » mais pour certains, ce toponyme viendrait du gaulois Maro-ceton, signifiant le Grand Bois.
Histoire
Préhistoire et antiquité :
Des silex néolithiques ont été ramassés près du château de La Louère (au nord-est du bourg).
Le dolmen du Chillou du Feuillet (voir Descartes) est parfois situé au sud-est de la commune de Marcé car une partie de la parcelle, où se trouve ce dolmen, est sur cette commune.
Des vestiges gallo-romains (monnaies et céramique sigillée*) ont été trouvés en 1872 aux Clôtures, près de La Babinière (au sud du bourg), et les photographies aériennes de Jacques Dubois*, faites en 1976, ont révélé la présence de constructions qu’il interprète comme un temple gaulois et un grand édifice à galerie.
Des domaines agricoles gallo-romains (villae*) existaient probablement à Jarcy (est), venant de Gerisiacus ou « domaine du germain Gerisius » et à La Jaunaie, venant de Gallinacus ou « domaine du Gaulois ou du Coq » (voir ci-après).
Les restes d’une construction, formée d'assises régulières de moellons, unis par un mortier très dur peuvent être vus près du lieu-dit La Pierre (au nord). Au début du 20ème siècle, un second bloc était visible à proximité, représentant la partie supérieure de l'édifice, mais il a été morcelé et a disparu. Louis Dubreuil-Chambardel* (voir Revue des Études anciennes, 25.3, 1923) voyait dans ces constructions les vestiges d’une pile funéraire, semblable à celle de Cinq-Mars-la-Pile mais on pense aujourd’hui qu’il s’agit plutôt de ceux d’un temple gallo-romain d’autant plus que le nom donné à ces éléments peut être une transformation de Pierre-du-Fan (venant du latin fanum = temple). Voir aussi Nouâtre, où l’on retrouve ce toponyme.
La voie gallo-romaine, qui allait de Poitiers à Amboise ; via La Celle-Saint-Avant et reprise partiellement par la D 336, passait à proximité de ce bâtiment.
À la Thomassière, lieu-dit aux limites de Marcé, Draché et Sepmes, se trouve un puits de 14 m. de profondeur, avec deux galeries partant vers le nord-ouest et le sud-ouest, qui indiquent la présence d’un aqueduc souterrain, dont le tracé n’est pas bien connu.
Histoire ancienne et moderne :
Au moyen-âge, l’église de Marcé appartenait à Hubert Persil « noble de Montbazon », qui la donna à l’abbaye de Noyers (commune de Nouâtre), comme l’indique la charte 75 (de 1080) du cartulaire de Noyers* ; ce don fut confirmé par Simon de Nouâtre, qui avait épousé Audeburge, dite Borille, une fille d’Hubert Persil.
Il y avait alors dix fiefs sur la paroisse et le plus important était sans doute celui de La Louère (voir ci-après), qui dépendait de la seigneurie de Bagneux à Bournan.
Les premiers seigneurs connus furent Jean Bazilleau (mort en 1445) et son épouse, Ysabeau Gautier, dame de Bagneux, qui vendirent le fief, en 1442, à Guillaume I Du Puy de Basché ou de Bagneux (mort vers 1486) et à son épouse, Marie Du Cormier, dame de Bagneux.
Par la suite, du 16ème au 18ème siècle, le fief appartint à la famille Berland. Le premier cité, en 1585, fut Pierre Berland, arrière-grand-père de René I Berland, seigneur de Maulay à Civray-sur-Esves, qui épousa en 1698 Nicole de la Bonninière (née en 1677), fille de Claude de la Bonninière, seigneur de Beaumont-la-Ronce. René I Berland fut pour sa part l’arrière-grand-père de Marie Louise Angélique de Berland, qui épousa en 1784 le futur vice-amiral Charles de Charritte (1733/1815), dit le comte de Charritte, qui se distingua pendant la guerre d’Indépendance des États-Unis.
On dit que ce dernier, blessé dans un accident de voiture à proximité du château de la Louère, fut transporté dans le château, où il fit la connaissance de Marie de Berland qu’il épousa ensuite. Après le décès de Marie de Berland, en 1790, le comte de Charritte épousa, en 1791, Marie Omer Théodore de Saint-Pol (morte en 1807) et fut le père de Pauline de Charritte (1793/1867), qui se maria, en 1810, avec Jacques Ladislas de Chastenet de Puységur (1787/1844), conseiller général d’Indre-et-Loire. Charles de Charritte mourut à La Louère, que lui avait léguée sa première épouse, et fut inhumé dans l’église de Marcé-sur-Esves.
L’Esves, qui coule du nord-est au sud-ouest, à l’est de la commune, avant de se jeter dans la Creuse, alimente plusieurs moulins, notamment celui de Liaunay (au nord-est), qui apparaît dès 1336 sous la forme L’Aunoy et, un peu au-dessus, celui de l’Écorche-bœuf (en ruines) ainsi que, au sud, le moulin de Gruteau, cité dès 1062, dans la charte 24 du cartulaire de Noyers*, sous la forme Molendinum circa Grautel (moulin dans les environs de Grautel), comme appartenant alors à Archambaud le Long, frère de Malran, seigneur de Nouâtre.
À voir dans le bourg
L’église Saint-Martin fut construite au 11ème siècle et elle garde de cette époque le portail d’entrée, en plein cintre ainsi que la nef ; les seigneurs de la Louère, qui avaient le droit de sépulture dans cette église, ajoutèrent une chapelle au 15ème siècle ; en 1620, Philibert Berland, fils de Pierre Berland (voir Histoire ancienne et moderne) obtint d’Hercule de Rohan, seigneur de Nouâtre, l’autorisation d’y aménager une crypte, où Charles de Charritte fut inhumé en 1815. (voir La Louère).
Il est probable que, dès l’origine, l’entrée était protégée par un porche roman, qui fut réparé ou reconstruit au 17ème siècle. Sur le mur sud (à droite) de ce proche, on voit un cadran canonial, qui indiquait les moments des différents offices.
À l’intérieur de l’église, on peut voir :
- À gauche de l’entrée, le chapelet de Claude Sauvageau, né à Marcé en 1643, qui partit en 1665 au Québec, où il a encore de nombreux descendants, qui ont fait édifier une stèle à gauche de l’église.
- À droite de l’entrée, un ancien bénitier en pierre, avec deux anses.
- Avant la chapelle seigneuriale, à droite, une statue du 16ème siècle, représentant peut-être Saint Martin.
- Au fond de la chapelle seigneuriale, une Vierge à l’enfant polychrome, du 17ème ou du 18ème siècle.
Mais ce qu’il y a de plus intéressant dans cette église, ce sont sans doute les nouveaux vitraux réalisés en 2003 par l’artiste-peintre Norbert Pagé et Hervé Debitus, maître-verrier à Tours. Ces vitraux sont des peintures faites par Norbert Pagé, né à Marcé en 1938 et décédé en 2012 et mises sur verre thermoformé. Ils évoquent (de gauche à droite) le chaos, la création du monde, le jardin d’Éden, Jésus dans le désert, Saint Martin (les 3 vitraux de l’abside), la Vierge, la Crucifixion et la Résurrection ; au-dessus de l’entrée, le Saint-Esprit.
Voir les sites de Norbert Pagé : https://norbert-page.com/ et d’Hervé Debitus : https://www.debitus.com/
Près de l’église se trouve un ancien presbytère du 18ème siècle.
Au nord de l’église, au fond d’une impasse, une ancienne maison semble dater du 15ème siècle.
À voir au nord
Chapelle Notre-Dame d’Auvergne (nord/nord-est) :
Cette chapelle a été fondée au 17ème siècle par Philibert Berland (voir l’église) et dédiée, je ne sais pourquoi, à Notre-Dame d’Auvergne. Au-dessus de la porte, se trouve une croix pattée ou croix des templiers ; cette croix est beaucoup moins visible depuis la restauration de cette chapelle où une procession se rendait avant-guerre.
Un peu avant la chapelle, au carrefour de la route allant vers Liaunay, il y a une croix de mission et un socle de pierre, que le Patrimoine des Communes d’Indre-et-Loire, interprète comme « un montoir destiné à faciliter la mise en selle des cavaliers » mais, étant donné que la pierre du dessus est percée en son centre, je pense qu’il s’agit plus vraisemblablement de la base d’une croix métallique qui a disparu.
La Louère (nord-est) (voir Histoire ancienne et moderne) :
Ce toponyme, qui signifie « lieu où il y a des loups », apparaît pour la première fois en 1442 quand l’ancien château « composé de plusieurs pièces tant hautes que basses, à feu … », selon un aveu rendu en 1782 par « haute et puissante demoiselle Marie de Berland [Marie Louise Angélique de Berland] » est construit.
Après la Révolution, le château appartint à la famille de Chastenet de Puységur, qui le reconstruisit à la fin du 19ème siècle, gardant de l’ancien château du 15ème siècle le donjon carré, couronné d’un chemin de ronde, avec mâchicoulis meurtrières ainsi que deux tours : une cylindrique au sud-ouest et une rectangulaire au nord-est, dans laquelle se trouvait la chapelle dont l'abside a été reconstruite. Les douves et les courtines ont disparu.
La Jaunaie (nord/nord-ouest) (voir Préhistoire et antiquité) :
Ce fief, qui relevait du château de La Louère, appartint, en 1666, à Georges de Mauléon, qui avait épousé, en 1664, Marie Anne des Housseaux, dame de La Jaunaie, puis, en 1696, à René de Mons, en 1698, à Côme de Mons.
Le domaine était la propriété, en 1782, du notaire Jean-Baptiste Fey de la Grange (1724/1784), époux de Renée Chevallier, née à Marcé en 1728.
En 1844, le propriétaire de l’époque : le baron Jean-Luc de Préaux vendit le domaine à Pauline de Charritte (voir Histoire ancienne et moderne), propriétaire de La Louère, veuve de Jacques Ladislas de Chastenet de Puységur et mère de Marie Marguerite de Chastenet de Puységur (née en 1820), épouse du comte Armand Louis Raoul de Martel (né en 1805).
C’est aujourd’hui une ferme complètement abandonnée mais il reste de l’ancien manoir deux tourelles carrées, couvertes de tuiles plates.
À voir au sud
Le Gué (sud-est)
Fief noble, relevant de Nouâtre, le Gué est cité dès 1110 sous la forme Vadum de Marchiaco (le gué de Marcé) et en 1444 sous la forme Gué de Marcé ; il y avait là un manoir dans lequel se trouvait la chapelle Saint-Julien, dont il reste quelques traces selon le propriétaire actuel.