Saint-Épain
Le nom de cette commune, située à l’ouest de Sainte-Maure-de-Touraine, apparaît pour la première fois en 774, dans le cartulaire de l’abbaye Saint-Martin de Tours, sous la forme Brigogalum signifiant, à l’époque gallo-romaine, « lieu fortifié » mais au 11ème siècle la paroisse a pris le nom de Sanctus Spinus : jeune homme qui, selon la tradition, aurait été massacré dans la région, avec ses 8 frères et sa mère Sainte Maure, après avoir été baptisé par Saint Martin vers 390.
Histoire
Préhistoire et antiquité :
Des outils du paléolithique et du néolithique ont été découverts à La Loutière (sud-est) et toute la région fut largement habitée au néolithique (voir ci-après). Des silex taillés ont été trouvés aux Roches (à l’est), sur la rive droite de la Manse.
Le toponyme La Pierre-Blanche (au nord-est) rappelle peut-être l’existence d’un mégalithe disparu.
La Cave Fourte, situé à La Morinière (nord-est), est souterrain-refuge, aménagé, selon certains, dès l’époque néolithique ou à l’époque gauloise selon d’autres (Voir Ernest Montrot* in BAVC 4.8 1943). On peut le visiter soit pendant les Journées du Patrimoine soit en en faisant la demande au propriétaire qui gère des gites à proximité.
Au-dessus de ce souterrain, au lieu-dit les Bardons, toponyme venant du gaulois barodunum, signifiant « colline fortifiée » des habitations troglodytiques ont été occupées au néolithique.
La vallée de Courtineau, à l’est, se trouve entre Saint-Épain et Sainte-Maure-de-Touraine mais la route qui permet de la visiter est sur Saint-Épain et elle est surmontée de nombreuses habitations troglodytiques, dont certaines ont été habitées dès le néolithique.
Après le Pont Goubault, sur la gauche, la Fontaine-Saint-Marc, dont l’eau, dit-on, soignait les problèmes de vue, est peut-être, comme à Chaumussay, une ancienne source sacrée de l’époque gauloise, qui aurait été christianisée.
Des domaines agricoles gallo-romains (villae*) existaient sans doute à La Chichery (sud-ouest, venant de Caducariacus ou « domaine de l’Épileptique », à Peigné (sud-est), venant de Paniacus ou « domaine du Pain » et à Vrillé (nord-est), venant de Apriliacus ou « domaine de Celui qui est né en avril ».
Deux voies gallo-romaines se croisaient à Saint-Épain :
La grande voie qui allait du sud au nord, arrivant de Nouâtre, entrait sur le territoire de la commune actuelle au lieu-dit La Billette (toponyme indiquant un octroi) puis passait à La Motte du donjon, où se trouvent les vestiges d’un ancien château médiéval et au Louriou, dont le nom vient peut-être du latin oratorium (lieu de prière), où un site gallo-romain a été repéré.
Elle entrait dans Brigogalum au lieu-dit La Boue (du gaulois bawa = lieu fangeux), où l’on peut voir un menhir christianisé et où elle franchissait la Manse près de son confluent avec le Ruisseau de Montgoger, puis continuait, à la sortie de l’agglomération, par l’actuelle D 8, avec une tranchée creusée dans la roche, en direction de Pont-de-Ruan.
Un peu avant la sortie de la commune, elle croisait une voie allant de Chinon à Loches, sans doute continuée par la D 21.
Venant de Crissay-sur-Manse, cette voie entrait sur le territoire de la commune à côté de La Maison-Rouge. Après le croisement, la D 21 passe au pied des ruines du château de Montgoger (Mons Gaugerii : la colline de Gaugerius) au 13ème siècle.
Au carrefour de La Billette (lieu différent du précédent), la voie est sans doute continuée par l’actuelle route-des-Aiguilliers, qui passe en-dessous de plusieurs sites troglodytiques et néolithiques, dont celui du souterrain-refuge de La Cave Fourte, près de la Morinière (voir ci-dessus), puis continuait en direction de Sainte-Catherine de Fierbois, en passant près des Maisons-Rouges et de Vrillé (voir ci-dessus).
Histoire ancienne, moderne et contemporaine :
Pendant une grande partie du moyen-âge, Saint-Épain fut l’objet de rivalités entre les chanoines de la collégiale Saint-Martin de Tours, propriétaires en titre de la ville, et les seigneurs de Sainte-Maure, qui possédaient le château de Montgoger (Voir ci-après) et qui revendiquaient le bourg.
Vers 1150, Hugues II de Sainte-Maure voulut percevoir des impôts sur les habitants et les astreindre à des corvées ; excommunié, ce dernier finit par faire amende honorable devant le tombeau de Saint Martin. Près de 100 ans plus tard, son arrière-petit-fils : Josbert I de Sainte-Maure, s’empara de la bourgade et n’accepta de la quitter qu’en échange d’une forte compensation financière.
En 1437, le roi Charles VII autorisa les chanoines à relever les fortifications de l’une « des plus belles villes champêtres et des plus marchandes du pays de Touraine, bien peuplée et garnie de beaux édifices ». La ville, en effet, était alors entourée de remparts dont les vestiges se trouvent derrière l’église.
En 1502, François de Baraton, époux d’Antoinette de Sainte-Maure et Grand Échanson du roi François 1er, propriétaire du château de Montgoger, fonda au pied de ce château le couvent de l’Homelaye (Voir ci-après) (voir aussi Montreuil-en-Touraine, Rivarennes et Saché).
Comme on l’ignore souvent, lors de la guerre de 1870, l’armée prussienne arriva jusque dans la région de Sainte-Maure, qu’elle occupa du 7 février au 7 mars 1871, ainsi qu’en témoignent les trois noms prussiens écrits en gothique sur le moulin de Rougemont près des Perrotins (Voir ci-après).
À voir dans le Bourg
L’église de la commune, dédiée à Saint Épain, fut construite au 12ème siècle, en remplacement d’une église antérieure, citée au 8ème siècle. Elle fut agrandie et modifiée dans les siècles suivants. Derrière et sur le côté de l’église, s’étend la Grand-Cour, dominée par une gargouille, qui, dit-on, représente un des curés de Saint-Épain. C’est là, probablement, que se jouaient les « diableries » dont parle Rabelais dans Le quart livre, chapitre 13, qui, dit-il, étaient aussi célèbres que celles d’Angers ou de Poitiers. À la différence des « mystères » ou des « miracles », qui étaient des spectacles religieux, les « diableries » étaient un spectacle populaire, souvent comique ou grossier, qui mettait en scène le diable et ses acolytes.
Derrière l’église se trouvent les vestiges des fortifications de la ville : la Prévôté ou résidence du Prévôt, qui administrait la commune au nom des chanoines de Saint-Martin, avec son porche, surmonté d’un hourd (galerie en encorbellement et à colombage) et son châtelet, système de défense qui protégeait cette entrée principale de la ville.
Un peu plus loin, derrière, se trouve le cimetière dans lequel on peut voir un chemin de croix monumental ainsi que le tombeau familial de la famille Artur de la Villarmois, propriétaire du château de Montgoger au 19ème siècle (voir ci-après).
Devant l’église, une maison du 16ème siècle, avec une échauguette et une tour hexagonale est appelée « la maison du prieur » mais, avant le 19ème siècle, aucun document ne parle de ce bâtiment, qui est mentionné pour la première fois dans un acte datant de l’an XIII (1804/1805) et n’indiquant pas d’origine de propriété.
Plus bas, au n°66 de la Grand-Rue, la maison dite des angelots date du 15ème siècle ; elle a été ainsi nommée en raison d’un motif sculpté, qui n’est visible que de l’intérieur de la demeure. C’était vers 1920 une auberge à l’enseigne du Cheval gris.
En prenant, en face de l’église, la rue des fontaines, on arrive à un beau plan d’eau près duquel se trouve le lavoir des fontaines, entièrement clos.
À voir au nord-est
La Deniserie (D 21, à gauche) :
Ancienne ferme comprenant un pigeonnier avec 18 boulins* et des perchoirs en fer. On dit que Raymond Queneau (1903/1976), auteur notamment de Zazie dans le métro, venait y passer ses vacances, quand il était enfant ; son père en effet, originaire de Saint-Épain, était né en 1870 dans la ferme familiale de la Touche (à droite, sur la route qui va à Thilouze), qui appartient toujours à la famille Queneau.
Montgoger
En face de la Deniserie se trouvent les tristes ruines du château de Montgoger. Ce fief, que l’on trouve aussi avec les orthographes Montgauger, Mongauger ou Mongoger, est cité en 1290 sous la forme Mons Gaugerii (la colline de Gaugerius) dans le cartulaire de l’évêché de Tours. Son premier seigneur connu est Philippe de Montgauger (né vers 1075), dont la fille ; Avoise de Montgauger (née vers 1105) épousa Hugues II de Sainte-Maure. Les seigneurs de Sainte-Maure le conservèrent jusqu’à la fin du 15ème siècle.
Par la suite les propriétaires furent François de Baraton, époux d’Antoinette de Sainte-Maure et grand échanson de François 1er, puis Louis Bourgeois (originaire de Blois), médecin de François 1er et d’Henri II, qui l’avait acheté en 1544.
Au 18ème siècle, il appartenait au duc César Gabriel de Choiseul-Praslin (1712/1785), ministre de Louis XV, petit-fils, par sa mère, Louise Henriette de Beauvau (1690/1737), de Gabriel Henri de Beauvau (1665/1738), comte de Crissé et seigneur de Montgauger.
Le château « l’une des plus belles maisons de notre royaume », selon Louis XIII, abrita vraisemblablement des faux-monnayeurs à la fin de l’ancien régime.
Au 19ème siècle, il appartenait à Martial Hippolyte Artur de la Villarmois (1777/1856), descendant, par sa mère des Choiseul-Praslin et ancien officier de marine de Louis XVI, dont le tombeau familial se trouve dans le cimetière de la commune.
Le château brûla une première fois en 1883, puis une seconde fois en 1943, alors que l’aile encore habitable avait été réquisitionnée par l’armée allemande.
Outre les ruines du château, qui ne peuvent être visitées, il reste aujourd’hui, au nord, la grosse tour ronde de l’ancien châtelet d’entrée, qui, à l’origine, était une tour d’angle du couvent de l’Homelaye (voir ci-après).
De l’autre côté, au lieu-dit la Nouvelle Porte, le châtelet d’entrée du 16ème siècle, avec deux tours rondes encadrant le porche, a encore fière allure.
L’Homelaye :
À côté du château de Montgoger, François de Baraton, fonda en 1502 le couvent des Minimes de l’Homelaye (voir la partie Histoire), dans lequel il fut enterré après sa mort. Cet ordre des Minimes (les Tout Petits), créé par Saint François de Paule (1416-1507), confesseur du roi Louis XI, se caractérisait par une grande austérité ; tout produit animalier, y compris le lait et les œufs, étant interdit dans l’alimentation des moines. Il ne reste de ce couvent que quelques bâtiments et une belle croix.
Rougemont :
Derrière cet ancien couvent, une petite route conduit au lieu-dit les Perrotins, et de là, en continuant à pied, on peut trouver, tel un fantôme au milieu des arbres, le moulin de Rougemont, qui est du type moulin-cavier*. S’il y a bien de nombreux graffitis sur les montants de la porte d’entrée de la cave, les trois noms des soldats prussiens (voir la partie Histoire) ne sont plus identifiables.
Theillé :
En continuant sur la D 21 en direction de Villeperdue, on trouve le lieu-dit Theillé (du latin tilietum = lieu planté de tilleuls), où une chapelle néo-gothique a été élevé au 19ème siècle, à la place d’un oratoire près duquel Saint Épain aurait été tué au 4ème ou 5ème siècle. Ce saint était évoqué pour obtenir la pluie et on se rendait en pèlerinage à cet oratoire, le dernier dimanche d’octobre ou lors d’une longue période de sécheresse.
À voir au nord-ouest
Saint-Martin :
Si on emprunte la D21, en direction de Crissay-sur-Manse, on passe au lieu-dit Saint-Martin, où l’on peut voir, à droite, un pigeonnier circulaire avec trois lucarnes et un lanternon.
À voir à l’est
Savonneau
Si, au lavoir des fontaines, on emprunte, à gauche, la rue de Savonneau, on passe devant le château de Savonneau, construit au 16ème siècle mais déjà nommé en 1091 dans la charte 209 du cartulaire de l’abbaye de Noyers* sous la forme terra de saponnelli, signifiant « la terre plantée de saponaires » (plantes utilisées comme savon, dont les rhizomes contiennent des saponines, qui font mousser l’eau).
C’était, à cette époque, un fief appartenant à la famille de Sainte-Maure, comme le fief voisin de Montgoger.
À voir au sud
Vallée de Courtineau (sud-est) :
Pour se rendre dans cette très touristique vallée, il faut emprunter, en face de l’église, la rue des fontaines, et continuer par la rue du viaduc ou D 210 en direction de Sainte-Maure ; on passe alors au moulin de Bisset puis on trouve, à gauche, une petite route qui conduit à Mont-au-Maire.
Ce lieu-dit, indiqué sur les cartes sous la forme Mont Omer, tire son nom de la charge de « maire », qui, au Moyen-Âge était une charge de police dépendant du prévôt. Ce « maire » était en 1476 Jean Mairel, qui venait d’acheter à François Dupin, dit le Baschier, « l’hostel du Mont », en même temps que Chemilly à Langeais. Le pigeonnier, avec les armes des chanoines de Saint-Martin, est postérieur à cet achat.
On arrive ensuite aux Roches, où des silex taillés ont été retrouvés et où des carrières de sarcophages mérovingiens furent transformées, au 11ème siècle, en habitations troglodytiques. Voir https://sites.google.com/site/37roches/
On passe ensuite devant le château de Brou et sous le viaduc des Besnault (voir Noyant-de-Touraine) et juste avant l’oppidum des deux Manses (voir Sainte-Maure-de-Touraine), on tourne à gauche vers Mareille. Nous sommes maintenant dans la vallée de Courtineau, proprement dite. Cette belle vallée a été creusée par la Manse de Souvres, petit affluent de la Manse de Sainte-Maure ; on peut voir, sur la rive droite, de nombreuses habitations troglodytiques, autrefois très habitées et transformées maintenant, pour la plupart, en résidences secondaires, et sur la rive gauche, qui est sur la commune de Sainte-Maure, plusieurs moulins.
Après être passé à Pont Goubault, on continue en direction de Courtineau. On peut trouver tout de suite sur la gauche, quatre sépultures mérovingiennes taillées dans le roc, qui contenaient des squelettes, dont la tête était tournée vers le nord ; des débris de poteries du 5ème ou 6ème siècle ont aussi été découvertes à cet endroit.
On peut voir ensuite, sur la gauche, la fontaine Saint-Marc, dont l’eau, dit-on, soignait les problèmes de vue puis sur la droite, un peu avant le viaduc de l’autoroute, un ancien lavoir.
Après Courtineau, ancienne paroisse, citée dans un document de 1425, et le moulin de la Chaise, on arrive à Notre-Dame de Lorette. Cette chapelle troglodytique du 15ème siècle a peut-être été appelée ainsi par analogie avec Notre-Dame de Lorette, en Italie, où la maison troglodytique de la Vierge Marie à Nazareth fut transplantée en 1290 et qui devint au 15ème siècle un des trois grands pèlerinages de la chrétienté, avec Rome et Saint-Jacques de Compostelle.
Dans cette chapelle se trouvent un croissant, une coquille Saint-Jacques, une croix des Templiers et diverses sculptures, dont une sculpture murale représentant deux anges portant un écu, surmontés du Père Éternel, du Saint Sépulcre et du Saint-Esprit, qui figurent la Trinité. Selon la tradition, Jeanne d’Arc s’y serait arrêtée en se rendant à Chinon pour rencontrer le futur roi Charles VII. Au-dessus de la porte d’entrée un blason portant un croissant renversé est surmonté d’une croix des templiers.
Un pèlerinage se rend à cette chapelle le 1er dimanche d’octobre et elle est généralement ouverte par la propriétaire l’après-midi, en été.
Sourday (sud-ouest) :
La propriété de Sourday (18ème) possède un pigeonnier porche.