Betz-le-Château
Le nom de cette commune, située au sud-est de Ligueil, apparaît dès le 6ème siècle sous la forme Bacias vicus équivalent de Bassias terras ou « terres de Bassius ».
Histoire
Ce site a été occupé depuis la préhistoire, comme le montrent les découvertes suivantes, dont certaines se trouvent au Musée installé dans l’ancienne et la nouvelle mairie :
- Du néolithique, polissoir mobile près de la ferme du Verger (sud-ouest), hache polie à la Grande-Audemoire (nord).
- De l’époque gauloise : amphores à La Piterne (est), monnaie (cimetière).
- De la période gallo-romaine : une nécropole, située près de l’ancien cimetière, avec de la céramique funéraire et la céramique sigillée noire ainsi que des poteries et un fragment de colonne (bourg)
L’oppidum de La Châtre (du latin castra = lieu fortifié), à 1 km à l’est du bourg, occupé sans doute dès le néolithique, s’étendait sur 30 ha d’un éperon naturel entre le Brignon et une « Courance » (fossé rempli d’eau) ; il était du type « éperon barré » et fermé par un rempart de terre ; il est considéré comme l’un des cinq grands oppida des Turons*, bien qu’il soit un peu difficile de comprendre quel était son intérêt stratégique.
On considère aussi que la motte castrale située près de l’église a été édifiée sur un éperon naturel, également occupé à l’époque gauloise (voir ci-après).
La voie gallo-romaine reliant la vallée de la Vienne à celle du Cher, venant du Grand-Pressigny, franchissait le Brignon à Sainte Jullite (commune de Saint-Flovier) et traversait tout le territoire, à l’est du bourg ; elle a été repérée dans le Bois de Chevreux, à La Biche et à La Faisanderie, avant d’entrer sur la commune actuelle de Verneuil-sur-Indre.
En 770, Charlemagne donna les bois des Clairets (nord-est) à l’abbaye Saint-Martin de Tours.
Au 16ème siècle, ces bois étaient partagés entre l’abbaye et l’évêché d’Angoulême. Au moment des guerres de religion, alors que les protestants dévastaient la région, le chapitre de l’abbaye voulut faire abattre des arbres dans ces bois pour reconstruire les édifices détruits et plaça deux bornes pour indiquer les limites des parcelles. Ces deux bornes d’une hauteur de 50 centimètres, situées à quelques centaines de mètres de distance l’une de l’autre, sont des blocs de roche dure locale équarris avec des faces bien plane. Sur l’une d’entre elles, une face porte l’inscription StMQDR (abbaye Saint-Martin) et l’autre face la lettre D (Doyenné de Saint-Martin) plus grande que les précédentes.
Le fief de Betz :
Le premier seigneur connu est Gilles de Betz (mort en 1037), qui fut sans doute l’édificateur d’une motte féodale (voir ci-dessus) et la châtellenie fut conservé par cette famille jusqu’au début du 16ème siècle.
Parmi les descendants de Gilles, on peut noter Pierre I de Betz (mort en 1463), qui fonda dans l’église une chapelle où il fut ensuite enterré. Sa fille Marguerite épousa en 1434, Pierre de Voyer (mort en 1481), seigneur de Paulmy et de La Roche-de-Gennes (commune de Vou).
La seigneurie passa ensuite à son fils Pierre II de Betz (1420/1501), chambellan du roi Charles VIII, qui épousa en 1444, à Sainte-Maure-de-Touraine, Catherine de La Jaille, fille de Charles II de La Jaille, seigneur de la Mothe-Yvons (Marcilly-sur-Vienne), Draché et La Tour Saint-Gelin ; ce sont eux qui firent reconstruire le château et agrandir l’église, dans laquelle leur fils, Jacques de Betz (né vers 1460), chambellan du roi Louis XI, installa une pierre tombale rappelant la généalogie de sa famille.
La fille de Jacques, Renée de Betz épousa en 1503, François de Couhé, qui accueillit dans son château, en 1517, le roi François 1er. Les seigneurs suivants furent leur fils Joachim de Couhé puis le fils de ce dernier, Paul de Couhé, au service du roi Henri IV, qui fit ajouter « de Lusignan » à son nom.
Le château resta dans cette famille jusqu’à Louis III de Couhé-Lusignan, arrière-petit-fils de Paul, né en 1641, mort sans enfant ; ses héritiers le vendirent alors, en 1706, à Jacques II Chaspoux (1630/1707), Trésorier de France (voir Généralité*) à Tours, lieutenant des gardes de Philippe d’Orléans (1640/1701), frère de Louis XIV, puis de Philippe d’Orléans (1674/1723), fils du précédent et futur régent.
Son fils, Eusèbe Jacques Chaspoux (1695/1747), fils de Jacques II et de son épouse Anne Claude Claire Renaudot (1664/1720), petite-fille de Théophraste Renaudot (1584/1653), hérita du privilège d’édition qu’avait son arrière-grand-père maternel ; au service de Louis XV, qui le nomma marquis de Verneuil, il connut un grand succès, ce qui lui valut les moqueries du Duc de Saint-Simon (1675/1755) concernant ses origines bourgeoises, son aïeul Jean Chaspoux, grand-père de Jacques II, ayant été marchand à Loches.
Eusèbe Félix Chaspoux (1720/1791), fils d’Eusèbe Charles, grand échanson de Louis XVI, fut le dernier seigneur de Betz, mais la famille, n’ayant pas émigré, garda la propriété du château, qui fut attribué à une de ses filles, Isabelle Élisabeth Anne Michelle Chaspoux (1751/1829), épouse de René Louis Charles de Menou (1746/1822), qui vendit le château, en 1833, à Charles François Jacques Arnault (1759/1842), qui fut maire de Betz-le-Château de 1800 à 1807. Ses héritiers, à leur tour, le cédèrent en 1874 à Jules Louis Gaultier.
Les propriétaires suivants furent, en 1939, Jean-Pierre Vignal, retraité des chemins de fer puis, en 1946, Maurice Vezin (mort en 1961), qui entreprit la restauration du château, continuée, à partir de 1974, par Daniel Vaucamp.
À voir dans le bourg
Église Saint-Étienne : construite au 12ème siècle (chœur et abside) et modifiée au 15ème (chapelle seigneuriale et clocher). Les ogives du chœur reposent sur 4 colonnes, dont les chapiteaux sont sculptés (feuillages, Annonciation, Daniel entre 2 lions). Pierre tombale des ancêtres de Jacques de Betz, surmontée d’une tête de chevalier. Vitraux des maîtres verriers tourangeaux*, Julien Léopold Lobin, Jean Prosper Florence, Julien et Lux Fournier ainsi que Van-Guy.
Le château : Résumé de l’article d’André Montoux* in BSAT 39 1977 (pages 443 à 454)
On accède au château par un majestueux portail en plein cintre appareillé en bossage et encadré de deux pilastres ioniques. Il fut aménagé au 17ème siècle dans le mur de clôture, qui n'existe plus aujourd'hui que d'un côté. Ce qui reste du château comporte essentiellement un corps de bâtiment, flanqué au midi de deux tours moins élevées que lui, et prolongé au nord par l'ancien pavillon d'entrée qui en est certainement la partie la plus ancienne. De plan carré, il était percé à la base par le porche muré de l'unique pont-levis, dont on voit les deux rainures verticales. Les deux étages, chauffés par des cheminées dont il ne reste que les jambages, étaient desservis par un étroit escalier à vis, logé dans une cage éclairée par trois petites ouvertures rectangulaires. Sur la face nord, au niveau du second, deux corbeaux de pierre supportent une bretèche, qui servait de latrine. Cette porte fortifiée devait être autrefois plus haute comme sembleraient l'indiquer les marches de l'escalier qui conduisaient à l'ancien comble.
Au rez-de-chaussée, la porte en anse de panier ouverte au 17ème siècle est surmontée de quatre belles fenêtres à meneaux, encadrées de baguettes. Les deux derniers étages ont conservé leur belle cheminée à hotte, l'une avec des jambages demi cylindriques, l'autre repose son linteau à double corniche sur deux colonnettes de grosseur inégale.
La tour ronde qui flanque l'angle sud-est a perdu semble-t-il, sa hauteur primitive et a été couverte d'une dalle de béton. Quelques corbeaux de mâchicoulis la couronnent. Ils étaient ornés d'arcs trilobés dont un élément subsiste à la jonction avec le bâtiment principal. En sous-sol existe une salle circulaire voûtée en coupole, dont l'entrée devait se faire uniquement par une trappe ouverte à la clef, mais maintenant murée. Bien que cette disposition évoque l'image d'une oubliette, il est bien probable qu'il ne s'agit en fait que d'un silo à provisions. La porte par où l'on y pénètre aujourd'hui par un escalier de treize marches, aménagé dans le mur d'un mètre soixante d'épaisseur n'a été ouverte que pour l'utiliser comme cave, à l'époque contemporaine sans doute.
La salle basse était un corps de garde ne prenant jour que par trois étroites meurtrières. Au-dessus était la chapelle éclairée au midi par une baie en arc brisé, tandis que l'entrée est surmontée d'une accolade. C'est une petite pièce carrée d'environ 3,50 m de côté, voûtée sur croisée d'ogives. Les nervures et les arcs formerets retombent sur des culs-de-lampe : deux représentent des angelots tenant un blason, un troisième est orné de feuillage, le dernier porte un masque très effacé. A la clef un écu sans armoiries est entouré d'un cercle quadrilobé inscrit dans une circonférence. Une moulure formant un arc trilobé au sommet, encadre une piscine à burettes encastrée dans la paroi. Des fresques ornaient autrefois la voûte et les murs. On y reconnaissait jadis saint Pierre et sainte Catherine, patrons des fondateurs probables Pierre de Betz et Catherine de La Jaille, qui furent vraisemblablement les constructeurs de l'édifice central entre 1444 et 1476. On ne distingue plus actuellement que trois anges aux ailes éployées, tenant les instruments de la passion. Une fenêtre étroite à simple traverse, éclaire chacune des pièces supérieures chauffées par des cheminées à hotte dont l'une est très endommagée.
La tour hexagonale, enrobée naguère de lierre, abrite un bel escalier à vis de pierre d'environ 1,80 m d'emmarchement. Arasée au sommet, elle est couverte actuellement d'un toit oblique assez inélégant. Des portes ouvrant sur le vide indiquent la présence d'un bâtiment disparu. Entre ces deux tours le mur goutterot du logis est doublé par une sorte de chemise déterminant derrière la chapelle et chacune des salles supérieures un petit réduit voûté. C'est à la base du dispositif que fut ouverte une brèche au cours de fouilles qui permirent, paraît-il, de découvrir des ossements humains.
Les souterrains : résumé de l’article paru dans le site Touraine Insolite : leur construction est probablement antérieure à celle du château. On y trouve des aménagements troglodytiques avec mangeoire pour animaux et rigoles d'évacuations creusés dans la roche. C'est un ensemble particulièrement complexe avec des galeries coudées et sinueuses, des aménagements de survie, des niches à lampes. L'approvisionnement en eau est fourni par une source visible au fond.
Il est impossible de les dater mais on peut affirmer qu’ils sont au moins du 11ème siècle, peut-être même ont-ils été creusés à l’époque des invasions barbares (5ème siècle). Ils sont constitués de deux réseaux distincts mais contemporains
Le premier souterrain, situé sous le château actuel il servait de refuge et de défense. Il est fort bien aménagé et comporte notamment une source et un silo pour entreposer la nourriture,
Le second souterrain, un long boyau où l’on accédait en traversant le fossé, était un souterrain de fuite. Il fut très modifié et utilisé ultérieurement comme habitation troglodytique. On y trouve une salle dont les parois sont creusées de 134 trous de boulin. Sans doute s’agit-il d’une magnanerie souterraine.
Lavoirs : Place Saint-Martin (dans le bourg, au nord-ouest) et Rue de la Forge (dans le bourg, au sud, sur le Brignon).
À voir au nord
Calvaire de la Thilouardière (entrée nord du village)
La Saulaie (nord-ouest) : le domaine appartenait au début du 16ème siècle à François et Jean Fumée (mort en 1531), chanoine de Saint-Martin de Tours, fils d’Adam Fumée. Ceux-ci le vendirent en 1512 à Jean François de Cardonne, seigneur d’Azay-sur-Indre et de Chédigny. Selon le site Tourainissime « En 1675, ce domaine appartenait à Léon Bouthillier de Chavigny » ; de qui s’agit-il ? Le plus connu, secrétaire d’état de Louis XIII, vécut de 1608 à 1652. Pigeonnier 18ème siècle, dans le parc.
La Philipponnière (nord-ouest) : Ce fief relevait du château de Betz. Au 18ème siècle, sa justice était réunie à celle de Betz. En 1600, ce domaine appartenait à Paul de Couhé ; en 1623, à Louis de Couhé (Voir Histoire du fief). En 1780, Eusèbe-Félix Chaspoux, marquis de Verneuil, fonda à La Philipponnière une commanderie de l'ordre de Malte, sous le nom de commanderie de Verneuil, et lui assura un revenu de 3000 livres. Ancien abri de bateaux sur un des étangs.
À voir au sud
La Bertaudière (sud-ouest) : le premier propriétaire connu, en 1593, est Jean Du Douet, également seigneur du Verger (Betz-le-château). Les propriétaires suivants furent, en 1594, Esme Du Douet, fils de Jean, mort sans enfant, puis Charlotte Du Douet, fille de Jean et son époux, Gabriel de Préville, puis leur fils, Antoine de Préville, puis la fille de celui-ci, Angélique de Préville, qui épousa en 1626 René IV de La Rochefoucauld, seigneur de Neuvy-le-Noble (Neuvy-le-Roi).
Ces derniers furent les parents d’Antoine de La Rochefoucauld (né en 1630), qui fut le père de Paul Louis Lhermite de La Rochefoucauld (1663/1716), dont le fils, Cyr Silvestre Louis de La Rochefoucauld, né en 1710, mourut à 17 ans et dont la fille, Jeanne Françoise Antoinette de La Rochefoucauld (1712/1737) avait épousé en 1731 Jean Étienne de Blanes (1702/1764).
La demeure est construite sur une cave dans laquelle s'amorce un souterrain bouché ; la maison porte la date 1570 à la tour d'escalier. Au 17ème siècle, on ajouta deux pavillons d'angle ; en 1771 la maison et la chapelle (aujourd’hui disparue) sont mentionnées en mauvais état ; travaux de restauration en 1779 ; les communs, de date inconnue, sont détruits après 1813 ; construction de nouveaux communs et d'un portail en 187. La cave semi enterrée est à 3 galeries voûtées en berceau ; les murs sont en moellon enduit et en pierre de taille ; la tour d'escalier et les tours d'angle ont un toit en pavillon.
La Brangeaudière (sud-ouest) : vieux puits.
Vestiges d’un moulin à eau sur le Brignon (sud-ouest).