Sainte-Maure-de-Touraine
Le nom de cette commune, chef-lieu d’un canton du sud-Touraine, célèbre pour son fromage de chèvre, apparaît pour la première fois, au 6ème siècle, chez Grégoire de Tours, sous la forme Arciacum, signifiant « domaine agricole d’Arcius » ou « domaine de la citadelle ».
Quant au nom de Sainte-Maure, il apparaît pour la première fois en 1065 dans la charte 47 du cartulaire de Noyers, cette sainte ayant été assassinée, selon la légende, sur le territoire de cette paroisse.
Histoire
Préhistoire et antiquité :
Des silex taillés du paléolithique ont été trouvés sur l’oppidum des deux Manses (voir ci-après) et à La Séguinière (nord-est du bourg).
Du néolithique date notamment le dolmen de la Pierre Fondue ou dolmen de Bommier, qui se trouve aux Raudières, à 3,4 km au sud-ouest du bourg, à proximité du hameau de Bommier (voir ci-après).
Il est composé de 3 supports, dont l’un fait 3 m. de long et d’une table de 3,5 x 2,3 m. L’ensemble est fortement incliné, d’où le nom de Pierre-Fondue et une autre table est en partie enterrée. Il est ouvert à l’est, comme tous les dolmens de la région.
Il fut signalé en 1842 à la Société archéologique de Touraine par l’abbé Jean-Jacques Bourassé* (1813/1872) (voir MSAT 1 1942, pages 57/58) ; on croyait à cette époque que les mégalithes avaient été élevés à l’époque celtique (d’où les noms de dolmen, menhir, etc.) et que les dolmens étaient des tables sacrificielles sur lesquelles les druides immolaient des êtres humains ; c’est pourquoi l’abbé Bourassé interpréta une rainure naturelle comme une rigole destinée à recueillir le sang des victimes !
Des silex polis du néolithique ont été découverts sur l’oppidum des deux Manses, près du dolmen de Bommier (voir ci-dessus), aux Chauffeaux et à La Folie (sud-est).
L’oppidum des deux Manses est un éperon barré situé au lieu-dit Les Poteries (nord-ouest du bourg), au confluent de la Manse-de-Sainte-Maure et de la Manse-de-Mareille (appelée aussi Manse-de-Souvres ou Manse-de-Courtineau).
Aménagée dès le néolithique, cette place-forte fut renforcée par les Turons* au moyen d’un rempart de terre qui subsiste sur 150 m. et qui est précédé d’un large fossé, appelé les Douves sur le cadastre.
La falaise qui donne sur la Manse-de-Sainte-Maure est creusée de grottes, sans doute naturelles à l’origine, qui ont été ensuite agrandies et aménagées ; l’une de ces excavations (la Cave-des-Bohèmes ou Cave-des-Romains) est composée de deux salles superposées et la salle supérieure est munie d’observatoires creusés dans le rocher, permettant de surveiller la vallée sur plusieurs kilomètres.
On y a découvert du matériel paléolithique, néolithique et de l’âge du bronze (hache et petit bracelet en bronze) ainsi que de l’époque gallo-romaine : nombreux fragment de tuiles, de vases et de céramiques, dont l’une porte une inscription incomplète.
L’établissement rural des Chauffeaux (sud-ouest) : ce site, occupé dès le néolithique, comme le montre la hache polie qui y a été trouvée, fut aménagé par les Turons* au 5ème siècle avant JC. Les fouilles ont été menées par Hélène Froquet (INRAP de Tours) lors de l’aménagement, en 2006, du lotissement des Chauffeaux (sud-ouest). Voir l’article de Francesca Di Napoli et Dorothée Lusson (INRAP de Tours), in RACF 50, 2011 (pages 109/174).
Il y avait là des bâtiments, dont certains abritaient des silos. Les fouilles ont aussi permis la découverte de poteries (jattes, gobelets) en céramiques grossière et fine, des éléments d’un carquois, une fibule (épingle) ainsi que des fragments de pesons et de fusaïoles (pièces de métier à tisser) indiquant que les habitants y travaillaient les poils de chèvre.
Ces habitants cultivaient également de l’orge, du millet, du froment, des lentilles, du lin et des ers ; ils mangeaient, en outre, des glands, des noisettes, des pommes, des prunes et des mûres ; ils élevaient des bœufs, des porcs et des chèvres ; ils avaient des chevaux et des chiens.
Une enceinte rectangulaire de 85 m. x 55 m., ouvrant au nord-ouest, entourée de talus de 4 à 5 m. de large, dominant des fossés de 2 m., sans doute protohistorique, existait près de la ferme du Châtelet (nord-est).
Les fouilles faites en 2013 par l’INRAP avant la construction de la LGV ont mis à jour, à La Crosnerie, au nord-est du bourg, un établissement rural gaulois, occupé au 1e siècle avant JC. Il y avait là un enclos quadrangulaire de 8 000 m², entouré de fossés et englobant des habitations, des greniers, des silos, un puits et des palissades ; les fouilles ont permis la découverte de céramiques, de parures en métal, de monnaies et d’outils ainsi que d’ossements d’animaux (bœufs, cochons, moutons ou chèvres). La présence de nombreuses scories de fer a aussi révélé l’existence d’activités métallurgiques sur ce site.
Des domaines agricoles gallo-romains (villae*) existaient sans doute à Anzay, cité dans la charte 415, de 1116, du Cartulaire de l’abbaye de Noyers*, sous la forme Anzaicum, toponyme venant d’Anciacus ou « domaine d’Ancius », lieu près duquel on a découvert, lors de l’aménagement de la D 108, en 1910, une nécropole dans laquelle on a dégagé des poteries, notamment une cruche de Samos, une cruche locale, deux écuelles en terre rougeâtre et une carafe en verre ainsi qu’une hachette en fer, ainsi qu’à Bommier, cité en 1088, dans la charte 160 du Cartulaire de l’abbaye de Noyers*, sous la forme villa Bomet.
La voie gallo-romaine qui allait de Nouâtre à Azay-sur-Cher est encore bien visible, notamment sous la forme d’un chemin qui part des Raudières (non loin du dolmen) et qui passe devant la ferme de La Petite Baillolière ; Il y a là plusieurs grosses pierres provenant, selon le témoignage du propriétaire, d’un lieu appelé Les Trois-Croix, au bord d’une petite route allant vers Maillé (voir Histoire ancienne ci-après) ; il aboutit ensuite au lieu-dit La Liberté, à une croix tréflée, entourée d’un déambulatoire, car cette voie devint ensuite un des chemins de Compostelle.
Après La Liberté, la voie se poursuit, à travers une propriété privée, jusqu’au Peu-Blanc ; elle traversait ensuite ce qui est maintenant un centre commercial, empruntait l’actuelle rue-du-Moulin, où il y avait un pont ou un gué sur la Manse, puis la rue Auguste-Chevalier et la rue-du-Docteur-Patry, en passant à côté de la butte du château, où il y avait sans doute une citadelle ; elle était finalement continuée par l’actuelle Impasse du Ha-Ha avant de se diriger vers Sainte-Catherine-de-Fierbois.
Notons enfin, pour terminer cette présentation, que des trouvailles gallo-romaines signalées (un tambour de colonne et une monnaie de Trajan (empereur de 98 à 117), ne sont pas localisées et qu’une nécropole du bas-empire (3ème/5ème s.), contenant 8 sépultures ainsi que des fragments de fusaïoles et de vases en terre rouge ou en terre blanche, se trouvait entre les rues de la Veillère et de l’Huilerie, au sud de l’église.
Histoire ancienne et moderne :
Comme nous l’avons vu ci-dessus, il y avait près de La Petite Baillolière un lieu appelé Les Trois Croix, près duquel se serait déroulée la troisième « bataille de Poitiers ». Plusieurs historiens pensent en effet qu’il y eut deux « batailles de Poitiers ».
la première aurait eu lieu à Moussais-la-Bataille (commune de Vouneuil-sur-Vienne, dans la Vienne) et aurait été gagnée par les troupes du gouverneur de l’Andalousie, Abd al-Rahman, qui auraient ensuite continué sur l’ancienne voie gallo-romaine Poitiers-Tours pour aller piller l’abbaye Saint-Martin à Tours ; la seconde se serait passée aux Landes de Charlemagne (commune de Ballan-Miré), lieu qui se trouve sur cette même voie et où de nombreuses armes maures ont été trouvées. Les Maures auraient été battus et auraient rebroussé chemin pour retourner en Espagne.
En accord avec plusieurs historiens locaux, je pense qu’il y aurait eu une 3ème bataille, qui se serait déroulée à Bellevue près des Trois Croix, monument commémorant cette bataille. Cette hypothèse repose notamment sur le fait qu’un ancien maire de Sainte-Maure, M. Mathurin Martin Tiffeneau (1811/1900) a trouvé près de là, sur La Bommelière, de très nombreux ossements, dont l’origine est inexpliquée ainsi que sur la tradition selon laquelle Charles Martel (688/741) aurait déposé son épée dans une chapelle située sur la commune actuelle de Sainte-Catherine-de-Fierbois, où Jeanne d’Arc (1412/1431) affirme savoir qu’elle y était (voir cette commune),
Il faudrait dans ce cas supposer qu’après leur défaite aux Landes de Charlemagne, les Maures auraient rebroussé chemin jusqu’à Sainte-Maure pour se diriger vers la vallée de l’Indre, où ils pouvaient retrouver une autre voie allant vers le sud. Quant à Abd al-Rahman, il aurait été tué lors de la seconde ou troisième bataille.
Au moyen-âge, avait lieu à Sainte-Maure, comme dans de nombreuses paroisses, la fête de la quintaine, qui prenait des formes différentes selon les endroits ; à Sainte-Maure, elle avait lieu le dimanche de la Quasimodo (1er dimanche après Pâques) près de la Manse, dans un grand pré au-dessous de la Fuye-de-Vaux (à droite de la D 910, quand on vient de Tours) et elle concernait les personnes qui s’étaient mariées durant l’année précédente ; la mariée devait chanter une chanson et le marié devait apporter 3 esteufs (balles à jouer) blancs, deux pour le seigneur et un pour le propriétaire du pré ; il devait aussi les jeter en l’air et les rattraper ; s’il n’y parvenait pas, il devait sauter au-dessus de la Manse, dans laquelle il tombait souvent à la grande joie des spectateurs.
Histoire du fief :
Selon la tradition le premier seigneur aurait été Goscelin le Poitevin, dit Goscelin de Sainte-Maure (mort vers 1050), compagnon de Foulques Nerra, (965/1040), et père de Hugues I de Sainte-Maure (1030/1115), dit Hugues l’ancien, qui participa peut-être à la 1ère croisade et qui fut enterré dans l’enceinte de l’abbaye de Noyers*.
Ce dernier fut le grand-père de Hugues II de Sainte-Maure, dit Hugues le jeune (1090/1165), enterré sous le parvis de l’église abbatiale de Noyers), dont le fils, Guillaume I de Sainte-Maure (1140/1205), participa à la 3ème croisade.
Par l’intermédiaire d’Isabelle de Sainte-Maure, (morte en 1310) descendante de Hugues II, considérée comme la plus riche héritière du royaume, qui épousa Amaury III de Craon (1280/1332), le fief passa à la famille de Craon.
Après avoir appartenu à la famille de La Rochefoucauld (voir le château ci-après), le fief devint la propriété de la famille de Rohan-Guémené, parmi laquelle on peut notamment citer Hercule de Rohan (1568/1654) qui organisa au château de Sainte-Maure une entrevue préparant la réconciliation, en 1589, entre Henri III et Henri de Navarre, (futur Henri IV) dont il fut ensuite un serviteur zélé, ainsi qu’Anne de Rohan (1609/1685) (voir les Halles, ci-après), épouse de Louis VIII de Rohan (1598/1667), fils Hercule, qui, après une jeunesse aventureuse, devint janséniste et contribua à la prospérité de Sainte-Maure ; le fils aîné d’Anne de Rohan : Charles de Rohan (1633/1699) devint fou avant de mourir en Belgique et son second fils, Louis, dit le Chevalier de Rohan (1635/1674) fut le condisciple et l’ami de Louis XIV avant de comploter contre lui et d’être décapité.
Le dernier seigneur de Sainte-Maure fut Henri Louis Marie de Rohan (1745/1809), qui perdit ses titres pour avoir émigré, célèbre pour ses prodigalités et par sa banqueroute retentissante de 1783, qui laissa un passif de 33 millions de livres !
Sur l’histoire de ce fief, voir l’étude très complète d’Ernest Montrot* sur Les seigneurs de Sainte-Maure, in BAVC de 5.2 à 5.8 (1946/1953)
Histoire contemporaine :
Il y avait trois lavoirs à Sainte-Maure :
- Le lavoir des tanneries, rue des tanneries (entre la rue de Chinon et la rue Gabriel Chevalier).
- Le lavoir des Vaux (entre le Petit et le Grand Vaux).
- Le lavoir de la Jugeraie (au bout de la rue de Verdun). Ce dernier lavoir a pris le nom d’un petit affluent de la Manse de Sainte-Maure, appelé aussi Manse de la Garnauderie.
L’histoire contemporaine de Sainte-Maure est marquée par l’aménagement de la Route Nationale n°10, ancienne route impériale n°11 en 1811 et ancienne route royale n°10 en 1824. Cette route, allant de Paris en Espagne, assura la prospérité de la ville en y amenant de nombreux voyageurs.
Prenant le nom d’avenue du général de Gaulle dans la traversée de l’agglomération, elle était bordée de nombreux cafés et restaurants parmi lesquels le plus connu fut le restaurant du Veau d’Or qui avait une étoile au Michelin dans les années 1960 mais qui est maintenant fermé comme beaucoup d’autres, la construction de l’autoroute A 10 ayant entraîné une forte diminution du passage et la RN 10 étant devenu la D 910. Il existe un excellent site sur cette route : voir http://nationale10.over-blog.fr/1-categorie-11214663.html.
À voir dans le centre-ville
Le château :
Construit au 11ème siècle par Foulques Nerra (965/1040), il fut reconstruit au 14ème siècle par la famille de Craon (voir Histoire du fief) puis agrandi par Aymar de la Rochefoucauld (mort vers 1461), fils de Guy VIII de la Rochefoucauld et de Marguerite de Craon. En 1660, il hébergea Louis XIV, de retour de Saint-Jean-de-Luz, où il était allé épouser Marie-Thérèse d’Autriche, fille du roi d’Espagne Philippe IV.
Il reste des vestiges importants de ce château, notamment une porte fortifiée du 14ème siècle et le logis seigneurial du 15ème siècle, qui servit de caserne après la Révolution et qui abrita une école communale de garçons de 1848 à 1968 ; on pouvait y visiter jusqu’à ces dernières années un petit musée qui sert maintenant de lieu d’exposition.
L’église :
D’abord dédiée à Saint Blaise (mort en 316) puis aux vierges Sainte-Maure et Sainte-Britte, elle fut construite au 12ème siècle en remplacement d’une chapelle qui aurait été édifiée au 5ème siècle pour abriter les reliques de Sainte Maure et de Sainte Britte (voir la chapelle des Vierges ci-après) ainsi que le relate Grégoire de Tours*. Selon la tradition, Sainte Brigitte de Touraine, dite aussi Sainte Britte et sa sœur jumelle Sainte Maure seraient originaires d’Écosse, au 4ème siècle.
En ruines à la fin du 18ème siècle, elle fut en grande partie reconstruite entre 1864 et 1869 par l’architecte Gustave Guérin (1814/1881) qui a cependant gardé l’abside et le chœur à voûtes angevines du 12ème siècle.
Jusqu’à la Révolution, il y eut dans l’église un mausolée abritant les restes de Renée du Fou, Dame de Sainte-Maure et de Nouâtre, fille de Jean du Fou, ainsi que ceux de ses deux maris successifs, Louis III de Rohan-Guémené (mort en 1498) et Guillaume de La Marck (mort en 1516).
Sous l’église se trouve une crypte qui est malheureusement fermée au public et qui serait une partie du château primitif ; elle abrite de nombreux vestiges et de belles statues, notamment une piéta du 17ème siècle et une statue de Saint Blaise, qui a été restaurée grâce Amis du Patrimoine de Sainte-Maure. Dans la nef méridionale (à gauche en entrant), un puits dit « des Vierges » était aménagé dans le mur extérieur ; sa margelle est visible, au niveau du parking, dans une sorte d’enfeu en arc brisé.
La mairie :
L’hôtel de ville actuel a été construit en 1866 sur l’emplacement de l’ancienne mairie installée en 1766 dans « la maison du sieur Guiet ». Notons que le docteur Adrien Barbot, pétainiste et collaborateur, maire nommé en 1943, fut révoqué en septembre 1944.
Devant la mairie on peut voir Le fruit de l’imagination : une belle œuvre de Charlie Boquet, jeune ferronnier d’art qui a pris la suite de son père à Sainte-Catherine-de-Fierbois ; c’est lui aussi qui, avec son père, a conçu et réalisé le mobilier urbain de la commune.
Les Halles :
Elles furent, dit-on, construites au milieu du 15ème siècle. Notons cependant que sur le montant d’une porte on voit un graffiti, représentant les armes de Jérusalem, qui pourrait rappeler la croisade de Guillaume I de Sainte-Maure (1140/1205) (voir Histoire du fief), ce qui, dans ce cas, reculerait considérablement la date de construction.
Quoiqu’il en soit, ces Halles furent largement restaurées en 1672 ; elles avaient deux grandes portes armoriées, qui ont été mutilées pendant la Révolution. Sur la porte méridionale, à l’opposé de la mairie, on pouvait lire « En l’an 1672, la très illustre Anne de Rohan [(1606/1685) voir Histoire du fief], princesse de Guémené, a restauré avec une magnificence remarquable ce lieu public qui avait été ruiné de fond en comble par la vieillesse et de défaut de réparations. C. Estevou [(mort en 1691), voir La Mérandière, ci-après] chevalier de la Mérandière, directeur de la ville et du château, en a été l’architecte ».
La porte occidentale, quant à elle, sur la place, portait l’inscription suivante « La très illustre Anne de Rohan, princesse de Guémené, en vue des mauvaises saisons, a construit en entier les Halles et les a décorées de sculptures en l’an 1672. C. Estevou, chevalier de la Mérandière, gouverneur de la ville, en a dirigé les travaux. »
Ces halles, qui sont toujours utilisées le vendredi, jour du marché, ont été modifiées au 19ème siècle avec la destruction du grenier à sel pour donner plus de clarté à l’intérieur et l’ouverture d’autres portes, dont la porte monumentale en face de la mairie, ainsi que dans les années 1960 avec l’aménagement de la partie centrale en salle des fêtes.
À voir dans le bourg
Rue du Moulin :
Cette ancienne voie gallo-romaine, continuée par une route médiévale, est encore bien marquée dans le paysage urbain ; elle entrait dans la ville par la porte du moulin, situé dans l’actuelle rue du moulin, où il y avait un moulin sur la Manse.
On peut y voir une maison du 15ème avec une double fenêtre à meneaux, un pigeonnier cylindrique, un ancien pont et une ancienne pierrée.
Rue Auguste Chevallier :
Cette rue, qui porte le nom d’Auguste Chevallier, (maire de Sainte-Maure de 1869 à 1884), était à l’origine une portion de la rue du moulin.
On peut y voir, au n°32, une ancienne maison à pans de bois et, au n°2, un ancien hôtel particulier du 16ème siècle, qui présente, au-dessus de la porte, trois blasons avec les lettres I.E. L.E. et C.E. C’était, selon certains, l’hôtel de la famille d’Estouteville et/ou, selon d’autres, l’ancienne maison de joie des seigneurs, qui aurait eu un passage souterrain avec le château.
Rue du docteur Patry :
La rue Auguste Chevallier se prolonge par la rue du docteur Patry (Marcellin, maire de Sainte-Maure de 1885 à 1894). On peut y voir quand on la remonte :
- Au n°10, une ancienne maison forte du 15èmesiècle.
- Au n°24, une ancienne maison à pans de bois qui a gardé l’emplacement de l’échoppe d’un commerçant.
- Au n°34, le passage du rempart qui conduisait à une poterne permettant d’accéder au château.
- Au n°52, à l’angle de la rue des douves, l’ancienne auberge de la belle image, où, comme l’indique une inscription, on pouvait trouver « bon vin » et « bon logis ».
- Au n°56, un autre passage conduisant vers une placette où se trouve l’entrée des souterrains de Sainte-Maure.
- Au n°67 (à gauche) un passage menant vers l’extérieur de l’agglomération.
- Au n°105 (à gauche) un autre passage conduisant vers l’extérieur de l’agglomération. Ces nombreux passages montrent bien que cette rue occupait l’espace entre les murailles.
Impasse du Ha Ha :
La rue du docteur Patry se prolonge par l’impasse du Ha-Ha, qui au moyen-âge n’était pas une impasse et au bout de laquelle il y avait une porte qui ouvrait sur la route de Sainte-Catherine.
Le ha-ha ou saut de loup était utilisé dans les fortifications pour retarder les assaillants. Un jour que Louis de France (1661/1711), dit le Grand Dauphin, fils aîné de Louis XIV, s’approchait d’un saut-de-loup dans les jardins du château de Meudon et que sa gouvernante lui barrait le passage, il s’écria : « Ha ha ! ce n’est pas cela qui doit me faire peur » et le nom resta à ces sauts-de-loup.
Le Prieuré Saint-Mesmin :
Situé à l’angle de la rue de Locheset de la rue Saint-Mesmin, ce prieuré fut fondé vers 1060 par Hugues 1er de Sainte-Maure comme l’indique la charte 334 du cartulaire de l’abbaye Saint-Mesmin de Micy (près d’Orléans), que Mathurin Martin-Tiffeneau (voir Histoire ancienne) a traduite et dont voici un extrait « Comme la vie présente est de très courte durée, il convient que chacun ait devant les yeux l’heure de sa mort et songe à la sentence du juge souverain qui pèsera les actions de chaque jour. (…) C’est pourquoi, moi Hugues, par la grâce de Dieu et mon droit héréditaire, seigneur et maître du château de Sainte-Maure (…) j’accorde et abandonne à perpétuité [à l’abbaye Saint-Mesmin de Micy] la possession et la jouissance (…) d’une étendue de terre près de mon château de Sainte-Maure, à prendre depuis son fossé [actuelle rue Auguste Chevallier] jusqu’au ruisseau qui coule au-dessous [la Manse] (…) à la condition qu’ils enverront quelques moines pour y élever une église en l’honneur du souverain Dieu et de son pieux confesseur Mesmin (…) »
Au 13ème siècle, le prieuré était devenu une paroisse autonome avec une église, dont il reste quelques beaux vestiges en mauvais état, et un cimetière autour de l’église. Il fut vendu à un particulier en 1793 en tant que bien national.
On peut noter qu’un autre prieuré, dont il ne reste rien, fut aussi fondé par Hugues 1er de Sainte-Maure ; ce prieuré Saint-Michel était au nord de la ville, actuellement place Saint-Michel, près du cimetière.
Le Couvent Notre-Dame des vertus :
À l’angle de la rue des Douves et de la rue de la Basse-cour et du Couvent, une école privée a pris la succession de l’ancien couvent Notre-Dame des vertus fondé en 1635 à l’emplacement où avait été découvert en 1633 une statue miraculeuse de la Vierge. Grâce à la générosité d’Hercule de Rohan (voir Histoire du fief) et, ensuite, avec l’aide de la grande autorité morale d’Armand Jean Le Bouthillier de Rancé (1626/1700), refondateur de l’abbaye de La Trappe, ce couvent des « Dames chanoinesse de l’ordre de Saint-Augustin » se développa et comprenait 26 chanoinesses cloitrées au moment où la chapelle fut construite en 1682.
Après avoir hébergé l’hospice communal de 1753 à 1770, les bâtiments furent occupés par une manufacture d’indienne puis, pendant la Révolution, par une fabrique de salpêtre. Depuis 1826, cet ancien couvent est devenu une école privée.
À voir en dehors du bourg
La Jugeraie (au nord-est) :
Ce fief est cité en 1188 sous la forme jugera Sanctae Maurae, pouvant être traduit par « les jugères de Sainte-Maure », la jugère étant une ancienne mesure de superficie valant 25 ares.
il appartenait en 1558 à Philippe Jouye, receveur des tailles en l’élection* de Chinon (voir aussi Beaumont-en-Véron) puis en 1619 à Gabriel Daresse, valet de garde-robe de Louis XIII puis, à partir de 1718 à Jean Félix Cantineau de Commacre (1697/1750) (voir Sainte-Catherine-de-Fierbois), dont le fils cadet, Félix Auguste Cantineau de Commacre, cité comme seigneur en 1789, également propriétaire de Fayette à Noyant de Touraine, fut le colonel de la milice communale de Sainte-Maure en 1790.
Le manoir, du 15ème siècle, remanié au 17ème, possède une cave voutée en plein cintre.
Au nord-est se trouve un souterrain-refuge, pouvant être visité lors des journées du patrimoine.
La Chapelle des Vierges (à l’est) :
Une première chapelle aurait été édifiée au 5ème siècle sur une colline où, selon la légende sainte Maure et sainte Britte auraient été massacrées et où se trouvait une source miraculeuse soignant la teigne de lait. Il est vraisemblable que cette source, qui existe toujours, ait été une ancienne source païenne ayant été christianisée, comme c’est souvent le cas.
Une nouvelle chapelle fut construite en 1760 ; une croix de pierre fut élevée à la même époque ; brisée en 1890, elle a été restaurée et remise sur son socle en 1938. La chapelle actuelle date de 1891.
La Mérandière (au sud-est) :
C’était un fief noble qui appartint en 1458 à Jean Paumart, écuyer et seigneur de Rilly-sur-Vienne ; sa fille, Marie Paumart (morte en 1516) épousa en 1458 François d’Aubigné (1437/1494), seigneur de la Jousselinière et de la Touche (en Anjou) ; ces derniers furent le grands-parents de René d’Aubigné (mort vers 1570), cité en 1546, un lointain cousin d’Agrippa d’Aubigné (1552/1630).
À partir du milieu du 16ème siècle jusqu’à la fin du 17ème siècle, les seigneurs en furent les Estevou de la Mérandière, dont le plus illustre représentant : Charles Estevou (mort en 1691) fut gouverneur de Sainte-Maure (voir les Halles).
Ce manoir a conservé une chapelle du 15ème siècle, décorée aux armes de la maison d’Estevou, et un pigeonnier-porche du 18ème siècle.
Sur La Mérandière, voir Ernest Montrot* : Notes sur quelques anciens fiefs de la commune de Sainte-Maure in BAVC 4.8 1943 (page 417 pour ce fief)