Tournon-Saint-Pierre
Le nom de cette commune, située sur la rive droite de la Creuse, à l’extrémité sud-est du département, apparaît pour la première fois vers 590, dans Histoire des Francs de Grégoire de Tours, sous la forme In vicis Tornomagensi, signifiant « dans l’agglomération de Turnomagos », c’est-à-dire « du marché (magos) de Turnus » ou « du marché de la Courbe (de la Creuse) ». Cette cité antique a donné naissance aux communes de Tournon-Saint-Pierre et de Tournon-Saint-Martin (dans l’Indre).
Histoire
Préhistoire et antiquité :
Un habitat néolithique, avec deux bâtiments et une dizaine de fossés, a été découvert à Gaudru (voir ci-après), près de la Creuse. Le même site fut ensuite occupé à l’époque gallo-romaine, du 1er au 4ème s. par un établissement rural couvrant 8 000 m².
La présence dans le toponyme du gaulois magos (marché) montre qu’une agglomération existait dès l’époque gauloise, grâce au fait qu’il y avait un marché, situé à la frontière entre le territoire des Turons*, des Bituriges Cubes, à l’est, limite marquée par le Suin, et des Pictons, à l’ouest, limite marquée par la Creuse.
D’origine gauloise sont aussi les toponymes Vonne (au nord), venant de Votanus ou « propriété du gaulois Votos » (voir ci-après) et La Bagonne (au nord-est), signifiant « terre du gaulois Bagos ».
Des domaines agricoles gallo-romains existaient aussi à Pouillé (voir ci-après), venant de Paulliacus ou « domaine de Paullius » et, probablement au Grand-Vicq (au nord-ouest), venant du latin vicus, « agglomération ».
Selon l’Histoire des Francs, Saint Martin* alors évêque de Tours, se rendit, vers 380, à Tournon par la voie romaine* qui allait de Tours à Argenton-sur-Creuse (voir ci-après). Il y détruisit le temple païen et y édifia la première église chrétienne de la commune qu’il dédia à Saint Pierre (voir ci-après).
Encore aujourd’hui, il existe dans la commune voisine de Tournon-Saint-Martin (Indre), au bord du Suin, une Fontaine-Saint-Martin, qui était sans doute une fontaine sacrée à l’époque gauloise ; elle est sensée avoir des propriétés surnaturelles pour guérir les maladies de la vue et de l’estomac.
La voie gallo-romaine qui suivait la rive droite de la Creuse, venant d’Argentomagos, signifiant le « marché de l’argent », aujourd’hui Argenton-sur-Creuse, dans l’Indre, entrait chez les Turons* au niveau du Suin, sans doute au moyen d’un gué, dont les traces sont encore visibles près du pont entre Tournon-Saint-Martin et Tournon-Saint-Pierre. Elle se dirigeait ensuite vers Yzeures-sur-Creuse, étant reprise d’abord par la D 750 puis, au niveau de La Croix-de-Pierre, par un chemin, qui passe à Gaudru (voir ci-après) et qui est perdu après ce lieu-dit.
Une autre voie gallo-romaine, celle dont parle Grégoire de Tours*, bifurquait de la D 750 au niveau de La Croix-de-pierre et se dirigeait vers Preuilly-sur-Claise. Cette dernière, probablement reprise par la rectiligne D 14, passait à côté de Vonne (voir ci-dessus), qui fut un fief au moyen-âge, puis à La Grosse-Borne (Bossay-sur-Claise).
Histoire contemporaine :
Louis Eugène Carré de Busserolle (1791/1841), oncle de l’historien Jacques Xavier (1827/1904), fut maire de la commune de 1825 à 1830.
Au 19ème siècle, une tuilerie fut créée à Renusson (nord-ouest du bourg) ; en 1873, elle fut transférée au lieu-dit La Bucherie (où ?) ; le site comprenait une halle principale et deux plus petites, trois maisons et un four qui fut détruit en 1959, année où l’entreprise cessa ses activités. Une autre tuilerie, construite en 1897, existait à Tournon-Saint-Martin.
Sont nés dans la commune :
- L’actrice Eugénie Nau (1860/1924), qui joua notamment le rôle de Gervaise dans l’Assommoir d’Albert Capellani (1874/1931).
- René Chabot (1936/2020), qui fut maire de Martizay (Indre) et député de l’Indre.
À voir dans le bourg
Église Saint-Pierre (4 Place du 11 novembre 1918) :
Article https://www.tournonsaintpierre.fr/fr/article/un-peu-d-histoire-7.html
« Une église du XIe siècle établie par les bénédictins de Preuilly [Preuilly-sur-Claise]. La façade date du XIIIième siècle avec ses contrefaits d’angles, sa petite porte en arc brisé, couronnée d’une rosace, elle-même surmontée d’une lucarne auréolée. L’édifice possède un petit clocher en charpente recouvert d’ardoises. La porte d’entrée est ornée de 2 archivoltes, l’une à rinceau de feuillage, l’autre à demi-sphères décorées de spirales partant d’un trou central. A droite, on peut voir une belle pierre d’attente des morts en calcaire.
En entrant, à gauche dans une niche, se trouvent les fonds baptismaux en marbre. La Nef de l’Eglise est formée de 3 tracés aux voûtes d’ogives surbaissées à moulures prismatiques reposant sur des piliers engagés et séparées par des doubleaux en arc brisé. Le chevet plat est percé de 3 petites baies en lancette. Le chœur, du XIVième siècle présente de chaque côté 3 arcades avec baies (dont deux sont obturées) à remplage ogival. On peut admirer, à gauche du chœur, creusée dans le mur, une armoire eucharistique qui daterait du XIVième siècle, reposant sur un pilier. Au-dessus du chœur, on peut voir un Christ en croix du XVIII ième siècle. A gauche de la Nef, on peut observer une chaire en pierre du XVIième siècle reposant sur un pilier. »
On peut aussi voir à l’intérieur :
- Les vitraux de Julien Léopold Lobin (1814/1864), datés de 1863, et ceux de son fils, Lucien Léopold Lobin (1837/1892), datés de 1868.
- Les trois verrières de Van Guy (1930/2017), dans le chevet. Voir maîtres-verriers tourangeaux*.
- Une statue de Saint Martin, du 19ème siècle.
Cette église est située sur Le Chemin de l’évêque de Tours, qui va de Ligugé (Poitiers) à Saint-Martin de Tours comme le montre « le pas de Saint-Martin » du sculpteur Miche Audiard (né en 1951), placé devant l’église.
À voir au nord
Le Grand-Pouillé (nord-est) (voir Antiquité) :
Le premier seigneur connu de ce fief, qui relevait de la baronnie de Preuilly-sur-Claise, fut Galehaut d’Aloigny, cité en 1467, maître d’hôtel de Louis XI et gouverneur de Châtellerault, grand-père de René d’Aloigny, cité en 1504, également propriétaire de Saint-Lifard à Bossay-sur-Claise.
Le dictionnaire de Carré de Busserolle* indique que le fief fut acheté en 1772, pour 40 000 livres, par N. d’Harambure ; il s’agit peut-être de Jean Samuel d’Harembure (1715/1802), gouverneur de Poitiers et propriétaire de La Chevrie à Chaumussay ou de son frère, le général Louis François d’Harambure (1742/1828), qui possédait l’Hôtel d’Harembure à Preuilly-sur-Claise.
Manoir des 14ème/15ème siècles, avec une massive tout d’escalier circulaire.
Les Vallées (nord-ouest) :
Le domaine fut la propriété de la famille Lhéritier de Chézelles, dont un membre, Samuel (1772/1829), fut un général de Napoléon.
Article https://fr.wikipedia.org/wiki/Ch%C3%A2teau_les_Vall%C3%A9es
« Le château est construit à la fin du xviiie ou au début du xixe siècle sur l'emplacement d'une demeure plus ancienne détruite à la Révolution ; il se situe au milieu d'un grand parc.
Construit en pierre de taille de tuffeau, le château se compose d'un corps de logis comprenant un rez-de-chaussée surélevé avec terrasse, un étage et un comble en retrait avec toiture à quatre pans en ardoises. Deux tours flanquent les angles de la façade sud.
Après la Première Guerre mondiale, les parents de la future cantatrice Mado Robin [1918/1960] s'en portent acquéreurs. Cette dernière, née dans la commune voisine d’Yzeures-sur-Creuse [où elle a un musée], y passe ses vacances d'été.
Chambres d’hôtes : voir https://www.booking.com/hotel/fr/chac-teau-les-valla-c-es.fr.html
Gaudru (nord-ouest, limite avec Yzeures-sur-Creuse) (voir Antiquité) :
Le premier seigneur connu de ce fief, propriétaire de 1455 à 1475, fut Jean Le Souffleur et le domaine resta dans la famille Le Souffleur jusqu’en 1786, année où il fut acheté par Hubert Pressigny, délégué de la paroisse en 1789 à l’assemblée préparatoire de Tours. Il passa ensuite, en 1789, à Demetrio Stephanopoli (1749/1821), maréchal de camp (général) d’origine grecque, descendant de David II de Commène, dernier empereur byzantin de Trébizonde au 15ème siècle, également propriétaire de La Gentilhommière à Lerné.
La ferme modèle de Baudru appartenait en 1920 à Georges Guillaume Henri Beaumont de La Barthe (1793/1850).
Extrait du livre de l’abbé Michel Bourdérioux* (1902/1991) : Touraine et Berry d’autrefois (1973)
« Dans la cinquième année du règne de Charles VII, roi de France, vivait sur les bords de la Creuse à la fine pointe méridionale du duché de Touraine et sur les confins berrichons et poitevins un gentilhomme de race du nom singulier de Le Souffleur. Il était sire de Gaudru et sa lignée ne prit fin en Berry qu’au siècle dernier. (…) Le manoir de Gaudru est un antique logis sans grâce aucune et qui n’a rien gardé de sa prospérité passée. Ravalé aujourd’hui au rang d’exploitation agricole, il a perdu tout caractère et fait piètre figure avec ses bâtiments mal adaptés à sa destination actuelle. A cheval sur deux paroisses, celle d’Yzeures et de Tournon-Saint-Pierre, il a été longtemps pomme de discorde entre leurs curés respectifs, chacun tirant la couverture à lui quand il y avait un bébé à baptiser, une fille à marier ou un mort à enterrer ! La paix se fit néanmoins un jour par un traité formel précisant que chacun des antagonistes exercerait alternativement son ministère sur le territoire contesté, qu’on dénommait pour cause « une virante ». Gaudru tirait jadis son intérêt du fait de commander un gué sur la Creuse. Ces lieux de passage, d’ailleurs, n’étaient jamais bénéfiques pour les usagers de cette rivière, ou du moins si peu ! On s’y noyait aux jours de crue, on s’y battait sans pitié, l’occasion donnée, quand l’ennemi vous pressait et qu’on voulait passer sur la rive opposée pour se mettre à l’abri. »