Céré-la-Ronde
Le nom de cette commune, située dans le sud-est du département, à la limite avec le Loir-et-Cher, où se trouve, au nord-est du bourg, le point culminant de l’Indre-et-Loire (le signal de la Ronde ou les Pyramides, à 186 mètres), apparaît pour la première fois chez Grégoire de Tours, au 6ème siècle, sous la forme Cerate vicus signifiant « agglomération du gaulois Ceros ». On trouve ensuite Cairé en 1247, Ceray au 18ème siècle, sur la carte de Cassini et enfin Céré-la-Ronde en 1936 (voir ci-après).
La Pyramide (photo PmD mai 2019)
Histoire
Préhistoire et antiquité :
Des fouilles faites aux Pyramides entre 1982 et 1984 ont mis à jour un important matériel lithique de cette époque : bifaces, nucléus, racloirs, perçoirs, pointes, lames, percuteurs, burins. Voir Jean-Claude Marquet : La préhistoire en Touraine (P. U. F. R. 2012).
Burins et nucléus découverts à La Pyramide (dessin J.C. Marquet)
Il y avait, à Toucheneau (à l’ouest du bourg) un dolmen, qui fut détruit après 1881, et un menhir de 1,60 mètre, appelé la Grosse Pierre ou le Gros Chillou, situé au lieu-dit le Chêne (à 1,6 km à l’ouest du bourg), fut détruit par le propriétaire du terrain en 1893.
Des domaines agricoles gallo-romains (villae rusticae) existaient sans doute à La Ronde (un peu avant le sommet), venant de Rotunda Villa ou « domaine en rond », à Mouzay (au sud-est), venant de Maletiacus ou « domaine du germain Maletus » et à Razay (au sud-ouest), venant de Rasiacus ou « domaine du Rasé » (voir ci-après).
La Ronde (photo PmD fév. 2025)
Deux voies gallo-romaines reliant la vallée de la Vienne à celle du Cher se croisaient, sans doute à la Croix-Mouzé (à la limite entre Orbigny et Céré-la-Ronde) : l’une venant de Vouneuil-sur-Vienne (Vienne) et continuant vers Montrichard (Loir-et-Cher), l’autre venant de Dangé-Saint-Romain (Vienne) et continuant vers Thésée (Loir-et-Cher). Voir https://turonensis.fr/categories/voies-gallo-romaines-chez-les-turons/les-voies-de-la-vienne-au-cher-6-1-6-2-et-6-3. Voir ci-dessous Ancienne voie entre Genillé et Céré-la-Ronde,, du côté de la Ferme neuve (photo PMD nov 2011). Voir aussi Genillé.
Histoire ancienne, moderne et contemporaine :
Une première église (voir ci-après) fut fondée au 6ème siècle par Euphrône, évêque de Tours de 556 à sa mort en 573.
Au 11ème siècle, une citadelle fut construite par Foulques Nerra à Montpoupon (colline du germain Poppo), au sud-ouest du bourg actuel (voir ci-après) pour contrôler la route entre ses deux places fortes de Loches et de Montrichard et il la confia à Lisois d’Amboise (990/1065).
Au 12ème siècle, un descendant de ce dernier, Hugues II d’Amboise (1140/1210), fils de Sulpice II d’Amboise, prit de parti d’Henri II Plantagenêt.
Pendans la seconde guerre mondiale, le maquis Lecoz (alias Georges Dubosq) (Voir aussi Beaumont-Village, Loches et Orbigny) enleva et séquestra pour quelques jours, contre rançon, les châtelains de Montpoupon (voir ci-après). Il s'installa du 6 au 12 août 1944 au château de Razay alors inoccupé (voir ci-après), qu'il pilla. Il investit ensuite, pour trois jours, le château du Grand-Biard (voir ci-après).
Par contre, plusieurs habitants de la commune participèrent à la résistance et moururent en déportation, notamment Louis Brunet (1897/1944), Roger Brunet (1902/1944) et Adrien Laporte (1910/1944).
Moulin de La Chaussée (photo PmD fév. 2025)
Plusieurs moulins anciens existent encore, en particulier, au sud-ouest, le moulin du Courbat, et le moulin Brouillon, figurant tous deux sur le plan cadastral de 1826, ainsi que, près du château de Montpoupon, le moulin Bailly ou moulin de La Chaussée (18ème s.), où il y a aujourd'hui l'auberge du château, et le moulin du Parc (sur le Chézelles ou Aigremont, au nord-est), où le peintre Armand Langlois (né en 1947), qui y habita de 1977 à 1990, avait ouvert un petit musée de l'imaginaire.
Histoire du fief de Montpoupon :
Au 14ème siècle, le seigneur de Montpoupon est Philippe I de Prie (mort avant 1347), également seigneur de Buzançais (Indre), sénéchal de Beaucaire et de Nîmes, époux d’Isabeau de Sainte-Maure, fille de Guillaume IV de Sainte-Maure (mort en 1271).Leur petit-fils, Antoine de Prie, conseiller de Charles VII puis de Louis XI, participa au siège d’Orléans avec Jeanne d’Arc en 1429 ; à partir de 1450, avec son épouse Madeleine d’Amboise, fille d’Hugues VII d’Amboise, tué à Azincourt en 1415, il reconstruisit le château, que l’on voit actuellement (voir ci-après).
Leur fils, Aymar de Prie (1453/1527), qui continua l’œuvre de ses parents, fut grand maître des arbalétriers de France, chambellan de Charles VIII, Louis XII et François 1er mais, ayant participé en 1523 au complot ourdi par le connétable Charles III de Bourbon (1490/1527) pour renverser le roi, il fut embastillé de 1523 à 1525.
Les seigneurs suivants furent Edme de Prie, fils d’Aymar, lieutenant-général de Touraine en 1570 puis son fils René de Prie (mort en 1605), écuyer de Charles IX, gouverneur de Saint-Aignan (Cher) en 1589, père d'Aymar II de Prie (mort avant 1649), connu pour sa violence, puis le fils de ce dernier, Louis de Prie (1600/1657), qui épousa Françoise de Saint-Gelais de Lusignan (1600/1673).
Celle-ci, qui fut dame d’honneur d’Anne d’Autriche, hérita du château et fut enterrée dans l’église de Céré-la-Ronde, où se trouve son épitaphe (voir ci-après). Après sa mort, le château passa à sa fille Louise de Prie (1624/1709), qui épousa en 1650 le maréchal de France Philippe de La Mothe (1605/1657) ; connue sous le nom de duchesse de La Mothe, elle fut la gouvernante des enfants de Louis XIV. L’héritière du château fut sa fille, Marie Isabelle de La Mothe (1654/1726), qui épousa le lieutenant-général Henry François de Saint-Nectaire, duc de La Ferté-Senneterre (1657/1703) et qui fut la gouvernante du futur Louis XV (voir tableau ci-contre, le tableau de François de Troy), sous le nom de duchesse de La Ferté-Senneterre, puis leur fille Françoise Charlotte de La Ferté-Senneterre (1679/1745), dame de Mennetou-sur-Cher (Loir-et-Cher).
Cette dernière, sous le nom de Mademoiselle de Menetoud, fut une claveciniste et une compositrice réputée (voir portrait ci-contre, source BNF) ; elle épousa en 1698 Louis Thibault de La Carte (1637/1721), premier gentilhomme du frère de Louis XIV, Philippe d’Orléans (1640/1701). Après sa mort, son fils Philippe Louis Thibault de La Carte (1699/1780) hérita du château, qu’il vendit en 1763 à Nicolas IV de Tristan, (1697/1765) qui commença la restauration du château, continuée par son fils Nicolas Marie de Tristan (1733/1820), dernier seigneur du fief.
Pour la suite, voir le château, ci-après.
À voir
Plan de la commune (panneau touristique)
Dans le bourg
Église Saint-Martin : une première église, édifiée au 6ème siècle par Euphrône (voir Histoire), fut remplacée au 12ème siècle par une église romane, sur les fondations de laquelle l’église actuelle, du 16ème siècle, a été construite, par Aymar de Prie (voir Histoire) et Jeanne de Céré, épouse de Begon d’Albin de Valsergues (voir Le Châtelier, ci-après).
Église Saint-Martin (photo PmD fév. 2025)
La base romane du clocher est de forme carrée, éclairée de meurtrières aux étages inférieurs et de quatre fenêtres plein cintre au beffroi. La flèche octogonale est gothique. La nef aboutit à un chœur à cinq pans dont trois sont percés de grandes fenêtres à remplage flamboyant. La façade ouest est percée d'une porte en arc surbaissé, décorée de pilastres Renaissance et d'une grande fenêtre à meneaux gothiques. Au nord, le porche présente des vantaux sculptés.
Vierge à l'enfant, 16ème (photo Guy Du Chazaud)
Selon Tourainissime, À l’intérieur, on peut voir à l'intérieur, une magnifique statue polychrome de la Vierge à l'enfant du 16ème siècle, dont une reproduction se trouve à l'extérieur (au-dessus de la porte latérale), deux tableaux du 17ème ou du 18ème siècle, représentant Saint Thomas d'Aquin et Saint Bonaventure, un chemin de croix du 20ème siècle en bas-relief, présentant notamment une mise au tombeau et, dans le chœur de l'église, des stalles des 15ème et 16ème siècle.
Ancien presbytère (photo PmD fév. 2025)
Au sud de l'église, l'ancien presbytère du 16ème siècle a dans un angle une tourelle d'escalier octogonale.
Maisons anciennes, impasse de La Forge (photo PmD fév. 2025)
Plusieurs maisons anciennes se trouvent dans le bourg, notamment, l'ancien bureau de poste et, impasse de la Forge, une maison du 16ème siècle, dans laquelle une partie a été aménagée en pigeonnier ainsi que, à côté, une maison, dont le toit est décoré d’une sphinge.
Au nord
Le Châtelier (nord-est) : le fief appartenait en 1429 à Charles II de La Jaille (mort en 1453), petit-fils de Jean III de La Jaille (mort en 1405), qui avait épousé en 1373 Yseult de Sainte-Maure, fille de Guy de Sainte-Maure (1307/1340), apparenté à la famille de Prie (voir histoire).
Vers 1480, le seigneur était Antoine de Céré, époux de Jeanne Faulcon de Thoron ; leur fille Jeanne de Céré, née vers 1480, épousa, en 1512, Begon d'Albin de Valsergues, lieutenant-général du Rouergue. Ils participèrent tous les deux à la reconstruction de l’église en 1520 (voir ci-dessus). Leur fils, Louis d'Albin de Valsergues de Céré, mort en 1559, lieutenant-général d'artillerie, épousa Renée de Chabannais, née en 1517 et leur fille Louise d'Albin de Valsergues de Céré (1543/1587), épousa, en 1559, Charles de Bremond d'Ars (1538/1599), qui, à la mort de son épouse, vendit le fief à Claude Dupré, trésorier de France en Saintonge.
La fille de ce dernier, Geneviève Dupré (née en 1575) épousa Pierre de Brillac (mort en 1649), lieutenant-criminel à Poitiers en 1586 et maire de cette ville en 1614. Ces derniers vendirent Le Châtelier en 1606 à la famille de Thienne, propriétaire de Razay (voir ci-après) et dès lors, l’histoire des deux fiefs est confondue.
Le Châtelier (plan J. M Couderc)
Il ne reste de cette propriété que les douves, au milieu d’un bois. Voir Jean-Mariy Couderc : les forêts tourangelles : un conservatoire archéologique, in BSAT 41 1987 (pages 585/587)
Au sud-ouest
Château de Montpoupon (voir Histoire du fief) :
Plan (panneau du château avec annotations PmD)
L’ancien château, presque entièrement détruit durant la Guerre de Cent Ans, fut reconstruit dans le style Renaissance, à partir de 1450, par Antoine de Prie, qui renforça Les murs de la façade nord. Aymar de Prie, inspiré par les constructions observées lors de ses voyages en Italie, se consacra à embellir sa demeure et fit bâtir la poterne qui peut ête vue aujourd’hui. Pendant la Révolution la chapelle fut entièrement détruite.
Château de Montpoupon (photo de G. W Lemaire)
Au 18ème siècle, Nicolas Marie de Tristan détruisit la tour carrée de la façade du Midi dans laquelle se trouvait l’escalier à vis qui montait aux étages et construisit un escalier en bois et briques à l’endroit où se trouve aujourd'hui l’escalier en pierre. Les héritiers de ce dernier vendirent le château, en 1836, à l’officier Lancelot Garnier de Farville (1774/1856), qui développa l’exploitation agricole et dont les héritiers, à leur tour, vendirent la propriété en 1857 à Jean Baptiste Léon de La Motte Saint-Pierre (1806/1872), qui modifia le château dans le style Renaissance, œuvre continuée par son fils Émile Léon de La Motte Saint-Pierre (1838/1912), garde général des eaux et forêts à Vierzon (Cher), maire de Céré-la-Ronde en 1874, qui modernisa le domaine et fonda l’Équipage de Montpoupon. En 1875, ce dernier aménagea dans la tour ronde (à gauche de l'entrée) sa chambre, qui fut transformée en bibliothèque après sa mort, ainsi qu'une nouvelle chapelle.
Vue d'ensemble (photo PmD fév. 2025)
En 1854, le cardinal François Nicolas Madeleine Morlot (1795/1862), archevêque de Tours de 1842 à 1857 puis archevêque de Paris jusqu’à sa mort, fonda au château une colonie agricole dans laquelle 18 orphelins défrichèrent et rendirent cultivables une soixantaine d’hectares.
Château (photo PmD fév. 2025)
Le fils d’Émile Léon, le capitaine Bernard Charles Marie de La Motte Saint-Pierre (1875/1956), connut pendant la seconde guerre mondiale l’occupation du domaine par les allemands puis les exactions du maquis Lecoz (voir ci-dessus). Sa fille, Solange de La Motte Saint-Pierre (1918/2005) ouvrit le château au public en 1971 et créa en 1995, dans les communs, le musée de la vénerie, avec son petit-neveu, Amaury de Louvencourt (né en 1951), actuel propriétaire du chateau, expert en œuvre d’art, auteur en 2017 de Montpoupon, une vie de château et conseiller municipal de Céré-la-Ronde depuis 2020.
Châtelet d'entrée (photo PmD fév. 2025)
Ce château, entièrement meublé, dont toutes les pièces sont commentées et sonorisées, est intéressant à visiter.
Tour ronde (photo PmD fév. 2025)
Dans les communs, subsiste également un pigeonnier du 16ème siècle, contenant 700 boulins.
Près du château, se trouve un lavoir, alimenté par le ruisseau de Chézelles, restauré en 2014. Avant de descendre à ce lavoir, un panneau indique "attention aux vipères" !
Lavoir près du château (photo PmD fév. 2025)
Voir aussi https://www.montpoupon.com/ et https://fr.wikipedia.org/wiki/Ch%C3%A2teau_de_Montpoupon
Razay : construit à la fin du 15ème siècle, le château appartint à partir du 17ème siècle à la famille de Thienne (voir Cigogné et Genillé). Le dernier seigneur de Razay fut le capitaine d’infanterie Louis Gaëtan de Thienne (né en 1723), qui avait épousé en 1767 Adélaïde de Vigny (1744/1793), sœur de Léon Pierre de Vigny (1737/1816), le père du poète Alfred de Vigny (1797/1863).
Razay (photo PmD fév. 2025)
Leur fille, Henriette de Thienne (1771/1831), qui avait épousé le comte Marie Georges de Saint-Chamans (1769/1818) fut, en 1828, victime d’un empoisonnement à l’arsenic, en même temps que son petit-fils, Étienne de Thourette, qui en mourut. L’année suivante, une servante du château, Marie Plessé (1801/1829) reconnue coupable de ce crime, fut guillotinée à Tours.
En août 1944, le château fut pillé par le maquis Lecoz (voir Histoire).
Remanié au 19ème siècle, le château offre des chambres d’hôtes. Voir https://www.chateauderazay.com/fr/page/le-chateau.
Biard-la-Chapelle : il y avait là un fief dépendant de l’abbaye de Baugerais à Loché-sur-Indrois, dans lequel une chapelle est attestée au 15ème siècle. Le château actuel date du 19ème siècle.
Château de Biard-la-Chapelle (photo PmD fév. 2025)
Le Grand Biard : dans ce fief, connu dès la fin du 13ème siècle, un nouveau château fut édifié au 19ème siècle, dans le style de la fin du moyen-âge.
Bâti selon un plan rectangulaire, le château a deux tours rondes situées à chaque extrémité de la façade antérieure. Le gros œuvre est en moellon enduit tandis que les parties supérieures des tourelles, les lucarnes et tous les encadrements des baies sont en pierre de taille. La façade antérieure comporte cinq travées ; celle du centre, où se situe l'entrée, forme un avant-corps peu saillant et possède une corniche qui rappelle les mâchicoulis des châteaux-forts. Une tour carrée, couverte d'un toit en pavillon, est placée au centre de la façade opposée, qui ne compte qu'une seule travée de chaque côté de la tour. Toutes les baies sont à meneaux et croisillons. Le toit à longs pans et pignons découverts est couvert en ardoise, de même que les tourelles au toit conique.
Le Grand-Biard (cp)
Le château avec son domaine de 16 ha (dont 9 ha de forêt et d’étangs), peut être loué et propose des chambres d’hôtes. Voir https://www.legrandbiard.com/?lang=en. Je ne sais pas si cette information est toujours exacte car je n'ai pas réussi à trouver ce château lors de ma visite de la commune en février 2025.